« Defining Love : a failed attempt » – DUBAÏ 2012

Le dernier Long métrage de Hakim Belabbes, « Defining Love : a failed attempt », est actuellement en compétition au Festival International du Film de DUBAÏ, qui se déroule du 9 au 16 Décembre 2012.

L’année dernière, « Boiling Dreams » de Hakim Belabbes remportait à ce même festival le prix du meilleur scénario et de la meilleure Image.

Peter Weir était le président du Jury.

 

 

Réalisation : HAKIM BELABBES

Production : LTF PRODUCTIONS – LATEFA EL BERKI

Image : Raphael BAUCHE

Post-Production Image : LA TOUPIE

Contact Presse : LATEFA EL BERKI – cinelat@yahoo.fr

 

 

Article paru dans « LE SOIR-Echos » du 12/12/12

La mosaïque de Belabbes

Le film de Hakim Belabbes, « Defining love : failed attempt » a été projeté lundi soir dans le cadre du festival de film de Dubaï, en présence de l’équipe du film.

« Defining love : failed attempt » (Tentative avortée pour définir l’amour) est en compétition officielle pour le « Muhr arabe ». Il  a été projeté pour la première fois dans le cadre du DIFF, en présence du réalisateur Hakim Belabbes, la productrice Latifa el Berki et des acteurs principaux Zineb Ennajem et Hamza Abderazik. Le film est un patchwork cinématographique basé sur une légende berbère. Isli et Tislit (le marié et la mariée en Amazigh), deux amants empêchés de s’aimer, finissent par verser des torrents de larmes et créent, selon le mythe, les deux lacs éponymes d’Imlchil, dans la région de l’Atlas.  Hakim Belabbes s’inspire de cette légende pour questionner l’amour. Brouillant les pistes, jonglant entre documentaire et fiction, il construit un film étrange, silencieux et sombre, avec en toile de fond, les deux amoureux maudits. Au début, on se croit dans un vrai documentaire. La caméra d’épaule tourne, bouge et se meut dans un paysage sauvage, recueillant arbitrairement l’avis des habitants d’Imlchil. Certains y croient, les yeux brillants, et d’autres balayent de la main ces « foutaises ». Le réalisateur lui-même mène l’enquête, pour finalement céder la place à ses deux protagonistes. Quelques séquences plus tard, retour à Casablanca. Zineb Ennajem et Hamza Abderaazik, en pleine séance casting, sont gentiment priés de se rendre sur les lieux de la légende et d’y puiser leur inspiration. A partir de là, commence un périple étrange dans une nature insaisissable où le spectateur ne sait plus si les protagonistes campent leurs propres rôles, et où les limites se brouillent entre réalité, fiction et légende. « L’élément de surprise était omniprésent pendant le tournage, et je découvrais petit à petit mon film, comme si je sculptais une pierre. Selon moi, la meilleure des fictions est la non-fiction. Et la réalité n’existe pas, il n’y a que des vérités qui appartiennent à chaque personne et j’ai un peu révélé la mienne tout au long du film, et celle des protagonistes », nous explique Belabbes à l’issue de la projection.

Sombre tableau de l’amour

Au fil des scènes, une infinie spontanéité et une grande dose d’improvisation plongent le spectateur dans une confusion et une déroute continues. Lorsque les personnages se mettent à nu et quand leurs langues se délient, c’est uniquement pour dévoiler leurs chagrins d’amour. Car tout tourne autour de l’amour, et chaque personnage est aux prises avec son échec sentimental. L’amour perd sa magie, et les héros se meuvent dans un monde où tout perd sens, comme victimes d’un acharnement du destin, ou prisonniers d’eux-mêmes. Hamza n’arrive pas à se donner complètement en amour, Mohammed le berger est très pauvre et ne peut pourvoir aux besoins d’Aïcha qu’il rêve d’épouser. Zineb – campée par Zineb Ennajem, désarmante de sincérité et de justesse – perdant toute illusion est déçue par son amant. «Je suis très attachée à la tragédie, je ne peux pas voir des gens abandonnés sans me dire que ça pourrait être moi. Mais il y a toujours de l’espoir dans la tragédie. Lorsque je sortais des films dépressifs de Bergman quand j’étais jeune, je sentais que je respirais mieux et que je cherchais l’espoir partout », nous confie le réalisateur. Au-delà du sombre tableau que le réalisateur brosse de l’amour, la nature sauvage se profile, et se taille une grande part dans la trame. Dans un Maroc à la fois opaque et limpide, et un paysage aussi redoutable que séduisant, trois thèmes s’enchaînent : la légende, la fiction et la réalité. Soutenu par une extrême lenteur, le film est une fragmentation continue des choses de la vie et un rythme haché qu’on aurait souhaité plus languide. Continuellement émaillé par des sous-titres métaphoriques qui le fragmentent en thématiques existentielles, le film jongle entre thème récurrent de l’amour et distille une vision chaotique du l’humanité. On ne sait pas trop si le film est une métaphore de la vacuité de la vie, un sombre manifeste de l’incongruité de l’amour ou une ode à Imchilil, ce Maroc reculé qui devient sanctuaire des âmes écorchées. Et pourtant on y décèle un regard enfantin et curieux, qui nous donne à voir, au-delà de la misère brute d’Imchlil, la beauté cachée d’un monde totalement dépouillé. Le film ouvre les portes de l’invisible et la nature vierge et oppressante d’Imlchil en devient sensorielle, regorgeant de plaisirs insoupçonnés. Sans doute tout ceci à la fois. « Ce que le général Lyautey appelait le Maroc inutile, je le montre à travers d’infinis détails. L’autre dimension est toujours là, il suffit juste de bien regarder». Le réalisateur parsème par-ci et par-là des lueurs d’espoir, s’aidant de scènes symboliques : la naissance d’un agneau, le jet revigorant d’une eau glaciale, le message d’un visage ridé, le confort organique d’une tente berbère. Notamment l’entêtante présence de l’eau, comme si la vie persistait, et le désir de vivre. Le film est un beau voyage sensoriel, à forte charge picturale et à grande portée mystique, qui reste cependant inachevé. D’ailleurs le réalisateur l’a reconnu lui-même : « Mon film n’est pas fini, dans cinq ans j’en ferai peut-être autre chose, qui sait ?» On espère qu’il réitèrera l’expérience avec un peu moins de fatalisme.

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